Pourquoi avoir décidé de quitter la Fédération de judo ?
« Si on reste indéfiniment dans le même milieu, on s’use, on stagne et je ne voulais pas de ça ; j’aime les transferts de compétences, les nouveaux défis, les nouveaux challenges. Je l’ai fait lors de ma carrière d’athlète et c’est la même chose pour la carrière d’entraîneur, J’ai toujours voulu prendre mon destin en main. J’ai pu capitaliser une expérience extraordinaire dans une discipline très exigeante, complète et variée d’un point de vue physique, tactique et technique c’est la raison pour laquelle je souhaite faire bénéficier d’autres athlètes de mon expérience, leur apporter une plus-value, les aider à passer un cap. De plus, j’ai toujours aimé créer le lien, être en quelques sortes un trait d’union entre des sports même très différents ; faire en sorte que les athlètes se croisent, discutent alors qu’ils ne se voient jamais. La fédération de judo est une structure fabuleuse qui m’a apporté énormément ; c’est un monde très structuré et organisé mais lourd et complexe à gérer; lorsqu’on sort de là, on a les armes pour affronter n’importe quel défi. »
Il n’est pas difficile de quitter un champion comme Teddy Riner ?
Cela faisait 8 ans qu’on évoluait ensemble. Nous avons tout gagné, Europe, monde, Jeux Olympiques. Mais je ne quitte pas seulement Teddy, il y a aussi les judokas de l’équipe de France que j’ai accompagné en juniors ou en séniors. Désormais, ils vont travailler avec un nouveau coach qui leur proposera une autre regard, une autre approche et, je l’espère, un second souffle pour aller chercher de nouvelles médailles. Stéphane Frémont qui m’a succédé juste après les JO de Londres faisait déjà partie de mon équipe. Il va préparer la prochaine olympiade sur 4 années pleines.
Quels souvenirs garderez-vous de ces années au plus haut-niveau ?
L’un de mes meilleurs souvenirs est d’avoir créé avec mes collègues entraîneurs un groupe juniors dès 2001 à l’INSEP. En cela j’ai pu m’appuyer sur le soutien de Stéphane TRAINEAU alors responsable de l’équipe de France mais aussi des parents des athlètes.
La promotion 2004 a été une formidable aventure avec 5 médailles au championnat du monde juniors de 2006 à St Domingue dont 3 en or ; des résultats incroyables. Puis une médaille olympique en 2008, 5 titres de champion du monde séniors et 2 médailles olympiques en 2012 (une en argent avec Ugo LEGRAND et une en or avec Teddy RINER). Et ce n’est pas fini, d’autres comme Cyrille MARET raccrochent le wagon en ce moment pour 2016.
Il y a eu bien sûr des joies, des déceptions mais au bout du compte, pas mal de ces jeunes ont réalisé leur rêve; je pense à Thierry FABRE, Loic KORVAL, Mathieu BATAILLE médaillés mondiaux, Benjamin DARBELET champion d’Europe juniors puis médaillé olympique à Athènes.
Un des meilleurs moments a été le championnat du monde par équipes à Bercy en 2011. Tous ces jeunes que j’ai entrainé en juniors ou séniors étaient réunis en une même équipe et ils ont gagné. C’était extraordinaire.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Mon nouveau défi est de mettre mon expérience et ma compétence au service des athlètes français pour leur faire passer le cap de la très haute performance. Je m’occupe actuellement de Romain GROSJEAN et Louis ROSSI et c’est un vrai bonheur car nous avons une grande confiance mutuelle et je pense leur apporter ce dont ils ont besoin. Je suis là pour les stimuler, les soutenir et leur faire passer un cap. J’espère qu’il y en aura d’autres de cette trempe quelle que soit la discipline.
Dans le même temps j’observe les évolutions du mouvement sportif Français, ministère, fédérations, comité olympique et peut-être j’y trouverai ma place une fois que tout cela arrivera à maturité dans quelques mois.
Dans tous les cas, le recul que j’ai aujourd’hui me permet d’avoir une certaine analyse de notre système qui n’est pas si mauvais et que beaucoup de pays nous envient.
Quels sont vos objectifs dans ce nouveau rôle ?
L’objectif n’est pas d’être champion de France, ou meilleur français à l’étranger mais de passer ce fameux cap. En judo, c’est d’être champion olympique, en sport mécanique c’est d’avoir un champion du monde dans une des discipline dites de « vitesse », en tennis, ce serait de gagner Roland-Garros ou un grand Chelem.
C’est très dur mais lorsqu’on est ambitieux et travailleur, tout est possible.
Propos recueillis par Pierre Lacombe, journaliste à France Télévisions